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Le temps des atomes
26/04/2012

De telles horloges sont utiles, et nécessaires, tout d'abord pour vérifier certaines théories de la physique, par exemple la relativité restreinte et générale. Ces théories prédisent que le temps ne s'écoule pas de la même manière selon qu'on est en mouvement ou pas, selon qu'on est plus proche ou plus éloigné du centre de la Terre. Pour vérifier ces prédictions théoriques, il a fallu embarquer des horloges dans des avions puis dans des fusées. Mais il fallait évidemment des horloges dont la stabilité était totale pendant la durée des expériences. Une autre question taraude l'esprit des physiciens depuis des décennies: les constantes de la physique sont-elles... constantes? La vitesse de la lumière, par exemple, a-t-elle toujours été celle qu'on mesure aujourd'hui? Les protocoles expérimentaux mis en place pour répondre à ce genre de questions requièrent des mesures de temps sur des processus physiques avec des précisions que seules les horloges atomiques peuvent donner. Autre exemple: pour démultiplier la puissance des télescopes, il faut les coupler. Il faut donc coordonner l'arrivée des signaux en provenance des différents télescopes avec des précisions très importantes.

Mais les horloges atomiques ont aussi leur utilité dans le vie quotidienne. Dans le système GPS, le positionnement d'un objet au sol se base sur des mesures de temps de transmission de signaux ; toute imprécision sur la mesure de propagation des signaux se répercute sur la précision au sol. Seules des horloges atomiques, embarquées à bord des satellites, peuvent apporter la précision et la stabilité nécessaires pour que la localisation soit utile. Dernier exemple, le plus important peut-être: le secteur des télécommunications. Les signaux dont nous sommes bombardés doivent être échantillonnés dans le temps à intervalles réguliers à l'émission mais aussi à la réception avec la même mesure. Si émetteur et récepteur ne sont pas synchrones, il y aura des problèmes. Plus la synchronisation est grande, plus les débits de transmission pourront être élevés; plus on peut échantillonner rapidement, plus on peut transmettre des quantités d'information par unité de temps. L'Internet haut débit n'est concevable que parce qu'il existe des horloges atomiques.

Mais qu'est-ce qu'une seconde?

Les horloges atomiques ont une autre utilité: être les gardiennes du temps. Ou plus exactement fournir la définition de l'unité de temps, à savoir la seconde.
Jusqu'en 1960, la seconde est définie comme étant le 3.600ème d'un 24ème d'un jour moyen, c'est-à-dire du temps moyen qu'il faut à la Terre pour accomplir sa rotation autour d’elle-même avec le soleil comme référence. Mais au fil du temps, la Terre tourne de moins en moins vite! C'est évidemment minime: dans 100 ans, la Terre mettra environ 2 millisecondes de plus qu'aujourd'hui pour accomplir un tour sur elle-même. Notre planète tournait sur elle-même en environ 23 heures il y a 200 millions d'années et elle tournera sur elle-même en 25 heures dans 200 millions d'années. En outre, indépendamment de ce ralentissement général sur le long terme, il y a aussi des irrégularités et des variations saisonnières, dans un sens ou dans l'autre. Autrement dit, un jour n'est pas l'autre. Pour le comprendre, il faut se souvenir du patineur sur glace: lorsqu'il tourne sur lui-même les bras écartés puis qu'il ramène ses bras le long du corps, il accroît sa vitesse de rotation. Il en va de même pour la Terre dont la vitesse de rotation change en fonction de la distribution des masses à sa surface, ce qui se produit par exemple lorsqu'il y a un tremblement de terre.  A cause de ces deux effets, il est difficile de baser une définition précise de la seconde sur la rotation de la Terre. Du moins si l'on veut que l'intervalle de temps nommé seconde reste constant à travers les siècles et même les millénaires. En 1960, il a donc été décidé de baser la définition de la seconde sur la révolution de la Terre autour du Soleil, phénomène plus stable que la rotation. La seconde a dès lors été définie comme la durée de cette révolution divisée par le nombre précis de jours qu’elle requiert (un peu plus de 365), puis par 24 et enfin par 3600, soit très rigoureusement la 31.556.925,9747 ème partie de l’année dite tropique centrée sur 0 janvier 1900 à 12h Greenwich. C’est la seconde dite des éphémérides dont la durée équivaut à celle de la seconde basée sur la rotation de la terre telle qu’elle avait typiquement lieu à la fin du XIXe siècle. Cette nouvelle définition de la seconde n'a perduré que jusqu'en 1967. Cette année-là, le temps est devenu atomique et non plus astronomique.  La précision des horloges atomiques est en effet telle qu'elles surpassent tous les autres systèmes de mesure du temps. C'est donc à elles que revenait l' « honneur » de servir d'étalon pour la définition de la seconde. C'est ainsi qu'aujourd'hui, la seconde se définit comme étant le temps qu'il faut pour qu’une certaine onde électromagnétique émise par un atome de césium fluctue 9.192.631.770 fois.

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