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Optimiser le chargement des avions
06/04/2012

Centre de gravité et moment d’inertie

Certains modèles optimisant le chargement des avions existaient déjà et prenaient en compte l’importance du centre de gravité. Dans un avion, le poids doit être réparti de manière à ce que ce centre de gravité, souvent situé approximativement au niveau des ailes, soit respecté. Autrement, l’avion ne décolle tout simplement pas. « Il y a une zone prédéfinie par le constructeur de l’avion dans laquelle le load master a un peu de marge, explique Sabine Limbourg, physicienne spécialisée en sciences de gestion. Et plus le centre de gravité se déplace vers l’arrière de l’appareil, moins l’avion dépensera de carburant. A titre d’exemple, si le point de gravité est déplacé de 5% vers l’arrière, un Boeing 777 entièrement chargé pourrait brûler environ 1% de carburant en moins, ce qui représente 1000 litres pour un vol de 10 000 kilomètres, soit Liège-Shanghai. »

Ces anciens modèles ne prenaient cependant pas en compte toute une série de contraintes existantes dans la pratique. « Ils avaient en réalité une autre finalité. Ils permettaient de sélectionner les ULDs à placer dans un avion en partant du postulat que celui-ci était toujours plein au moment du décollage, développe la physicienne. Par exemple, poursuit le Professeur Schyns, sur 100 ULDs pour 80 emplacements dans un avion, ces modèles déterminaient quels ULDs allaient être affrétés. Mais alors, 20 d’entre eux restaient sur le tarmac et n’étaient pas pris en compte. Mais un tel cas dans la réalité génère des clients mécontents. Dans la réalité, ça ne fonctionne pas comme ça. » Il est même très rare qu’un avion soit entièrement plein quand il décolle. Ils sont en moyenne remplis à 60% de leur capacité. Or le modèle liégeois gère beaucoup mieux les appareils avec charge partielle.

En tenant compte de cette réalité et en l’intégrant dans le modèle, il fallait dès lors tenir compte d’un autre paramètre à minimiser pour un confort de vol optimal, le moment d’inertie. L’inertie entre très peu en compte dans un avion pleinement chargé. Il s’agit en réalité d’un frein à la rotation généré par une répartition trop étalée du poids. « Par exemple, illustre l’informaticien, si vous voulez faire tourner un objet sur lui-même, vous dépenserez plus d’énergie si le poids se trouve aux extrémités plutôt qu’au centre. Et selon le même principe de physique, une patineuse artistique, pour tourner le plus rapidement possible, va se recroqueviller le plus possible sur elle-même. Elle va donc minimiser son moment d’inertie. C’est un peu le même processus que l’on vise en chargeant un avion. » La priorité est d'avoir un chargement compact, comme cela est fait en pratique, pour différentes raisons opérationnelles. L'inertie est la solution apportée par le modèle liégeois lorsque le chargement est partiel. Les opérateurs ne réfléchissent pas en terme d'inertie et ne réfléchissent en réalité que peu à la maniabilité. Le but de l'équipe liégeoise, à travers l'inertie, est surtout de compacter le chargement pour qu'il ne soit donc pas disséminé dans tout l'avion. La cerise sur le gâteau est que cette approche par inertie augmente la maniabilité…mais ce n'était pas le (premier) but recherché.

L’objectif pour un chargement optimal d’un avion qui ne sera pas rempli sera donc dans un premier temps de respecter le centre de gravité, et ensuite de placer les ULD autour de ce point, sans les étaler dans l’avion, sans laisser d’espaces vides entre eux. Un moment d’inertie minimisé permettra à l’appareil d’utiliser moins de forces lors de changements d’altitude ou de trajectoire, ce qui se traduira par une plus grande maniabilité pour le pilote ainsi qu’une économie de carburant. Il permettra de surcroît d’amoindrir le risque d’abîmer l’avion. « En effet, intervient la physicienne, si on place l’ensemble des marchandises aux deux extrémités de l’avion en laissant le milieu vide, le centre de gravité est respecté. Cependant, l’appareil développe un risque de se courber comme une banane et, dans le pire des scénarios, de se briser. » Donc, entre deux solutions qui offrent un même centre de gravité, il sera préférable de choisir celle où les ULD sont le plus concentrés, regroupés autour de ce point.

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