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Chansons de gestes
03/04/2012

Techniques optoélectroniques et vidéo, plateformes de force, électromyographie : l'analyse du mouvement humain exige des technologies de pointe. Inauguré en mars 2012, le LAMH (Laboratoire d'analyse du mouvement humain) s'intéressera tant à la performance sportive et à la prévention des lésions chez l'athlète qu'aux pathologies neurologiques, telle la maladie de Parkinson, à l'aide à la conception de prothèses ou encore à des questions de génie civil, comme l'effet de marche sur certaines structures.

Sur la photo jaunie, l'un est debout, le buste légèrement incliné ; un autre, bras écartés, genoux fléchis, se tient de profil ; un troisième se trouve en appui sur les quatre membres... Bientôt, le starter fera retentir le coup de pistolet libérateur. Nous sommes en 1896 à Athènes, où se tiennent les premiers Jeux olympiques modernes, et les athlètes, prêts à en découdre sur la distance mythique de 100 mètres, ignorent que le choix de leur posture de départ est déterminant dans l'accomplissement d'une performance. C'est qu'à l'époque, la biomécanique en est à ses premiers balbutiements.

Athènes-1896

Dans la seconde moitié du 19ème siècle, Eadweard Muybridge (1830-1904) devint célèbre pour ses décompositions photographiques du mouvement. Sa technique, la chronophotographie, méthode consistant à fixer les images successives d'un mouvement sur un même support photographique, inspira le physiologiste Étienne-Jules Marey, professeur au Collège de France, qui fut l'un des pionniers de l'approche scientifique de l'analyse du mouvement. Marey commença ses études par des recherches sur les animaux. Ainsi, il « filma » le vol des oiseaux ou le galop du cheval. Il s'intéressa ensuite à la locomotion humaine.  Une de ses principales contributions fut la pose de marqueurs sur les vêtements des volontaires qui se prêtaient à ses travaux. The-Horse-in-Motion-MuybridgeUne méthode dont l'intérêt n'a jamais fléchi, puisque les systèmes optoélectroniques actuels supposent le placement de marqueurs sur la peau des sujets dont les biomécaniciens s'efforcent de décortiquer les mouvements.

Aujourd'hui professeur émérite, Simon Bouisset fut responsable du Laboratoire de physiologie du mouvement à l'Université de Paris-Sud. Il conçoit la biomécanique comme « l'étude raisonnée des phénomènes du mouvement chez l'homme et chez l'animal ». Cette définition a le mérite de s'écarter d'une vision purement mécaniste et souligne la nécessité d'intégrer, à un stade ultime, le mouvement dans son contexte neurosensoriel.

L'illusion d'un idéal

Les biomécaniciens s'accordent pour considérer qu'il n'existe pas a priori un geste idéal vers lequel doivent tendre les athlètes - le sport de haut niveau est le terrain de prédilection de l'analyse du mouvement -, mais seulement un optimum pour un individu donné à un moment donné. En d'autres termes, l'efficacité d'un geste comme le lancer du javelot ou le swing du golfeur ne résulte pas d'une technique immuable qui doit être apprise comme une comptine pour enfant, mais plutôt d'une adéquation entre la force, l'expérience, les dispositions physiques et mentales du sportif au moment de l'action. Cela condamne-t-il pour autant toute recherche visant précisément à ordonner la pratique gestuelle de chacun ? Non, bien sûr. « Il existe des paramètres de performance que la biomécanique essaie de dégager, indique Bénédicte Forthomme, Chargée de cours au département des sciences de la motricité à la faculté de médecine de l'Université de Liège (ULg) et membre du Laboratoire d'analyse du mouvement humain (LAMH), récemment créé. Par exemple, toutes autres choses étant égales, les tennismen dont les balles de service sont les plus rapides sont ceux qui amènent l'épaule en rotation externe à autant de degrés et qui positionnent le corps de telle façon. On peut donc essayer d'optimiser ces paramètres, mais dans les limites de la morphologie propre à chaque athlète. »

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