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Le mystère de l’extinction des ichtyosaures
08/03/2016

Et cela pose une dernière question : que s’est-il passé lors de cette dernière phase avec la dernière niche existante, celle qui regroupe les ichtyosaures à grandes dents ? « On ne sait pas, avoue Valentin Fischer. On en revient à l’hypothèse de la nourriture. A ce moment-là en effet, les ichtyosaures n’occupent plus qu’une seule niche. Ils sont plus vulnérables. Et à la fin du Cénomanien, il y a des extinctions de céphalopodes et cela a pu les impacter même si les derniers ichtyosaures appartiennent à une niche ayant beaucoup de proies possibles. Mais surtout, il y a beaucoup de changements dans toute la biosphère marine. »

squelette ichtyosaureLa fin de Cénomanien va en effet connaître un grand pic de température. Il n’y a plus de glace sur la Terre ; les eaux ne se refroidissent plus et la circulation océanique est ralentie. Presque tous les groupes marins vont alors subir des bouleversements importants. Ce n’est pas une extinction massive car certains vont disparaître mais d’autres vont apprécier ces nouvelles conditions et des radiations vont avoir lieu. Pendant cette époque, les animaux ont évolué très rapidement. Des lignées de poissons osseux et de requins apparaissent, notamment ceux qui vont peupler les mers actuelles. La cause possible de ce chamboulement ? La séparation des continents qui n’a jamais été aussi rapide. Elle modifie les courants marins, la circulation thermohaline globale et le niveau des océans. La séparation implique en effet l’apparition de dorsales au fond de l’océan, qui soulèvent les eaux. Et les éruptions volcaniques sont fréquentes, qui rejettent une série de gaz à effet de serre dans l’atmosphère, ce qui entraîne la fonte des glaces et accroît encore le niveau des mers. Tout est interconnecté. Les composés soufrés sont dissous dans l’eau et accroissent directement ou indirectement son acidité. Et les fonds marins semblent avoir été privés d’oxygène. « On ne sait donc pas au juste ce qui s’est passé pour nos derniers ichtyosaures. Ce n’est sans doute pas une cause unique qui a provoqué leur extinction, se désole Valentin Fischer. Il est probable que nous ne connaîtrons jamais le fin mot de l’histoire. »

A moins que… Toujours en collaboration avec le service de Matt Friedman de l’Université d’Oxford, Valentin Fischer va maintenant abandonner ses ichtyosaures pour étendre ses recherches à d’autres groupes marins afin d’avoir une idée plus précise de ce qui s’est passé à d’autres niveaux de la chaîne trophique. Dans ce cadre, la laboratoire liégeois, rebaptisé EDDy lab (Evolution and Diversity Dynamics lab) en hommage aux travaux du professeur Edouard Poty, auquel Valentin Fischer a succédé, va notamment s’intéresser à l’évolution des poissons et de récifs constitués de bivalves (les rudistes ou hippuritoïdes), devenus dominants au Crétacé en lieu et place des récifs coralliens, avant que ceux-ci ne reprennent le dessus et que les bivalves ne disparaissent… en même temps que les dinosaures ! Une histoire à suivre.

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