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L’insoupçonné herpèsvirus de la tortue
23/10/2015

Coévolution

Parallèlement, les chercheurs ont fait une autre découverte au niveau de la phylogénie des espèces virales. Il y a bien longtemps (de l’ordre de 156 millions d’années), les tortues terrestres et les tortues marines avaient un ancêtre commun. Elles ont ensuite évolué en deux branches, l’une sur terre et l’autre aquatique. Bien qu’elles se ressemblent toujours physiquement, elles sont en réalité devenues génétiquement aussi éloignées qu’un cheval et une baleine.

Or si l’on compare l’herpèsvirus qui affecte les tortues terrestres et un autre herpèsvirus (l ’herpèsvirus chelonien 5) qui touche leurs cousines marines, on constate qu’ils sont apparentés comme le sont les tortues qu’ils infectent. C’est ce qu’on appelle la co-spéciation. Cela démontre que les herpèsvirus des tortues terrestres et aquatiques ont probablement une origine ancestrale commune et ont coévolué avec les espèces de tortues. Le dernier secret livré par TeHV-3.

« Toutes ces découvertes prises ensemble expliquent pourquoi ce virus de tortue finit en première page de la plus grande revue de virologie », sourit Alain Vanderplasschen. Cette recherche a pourtant failli ne jamais aboutir. En effet, ce programme de recherche visant à trouver une solution à une des causes principales du déclin de plusieurs espèces de tortues menacées impliquait la réalisation d’expérimentations animales. Celles-ci n’ont pu être réalisées qu’à l’issue de nombreuses et longues discussions avec le comité de bioéthique, seul organe habilité à autoriser la réalisation d’expérience animale. Il est déplorable de constater que la pression exercée par une partie de la société contre l’expérimentation animale a pour conséquence d’empêcher le développement de solutions contre un fléau menaçant plusieurs espèces de tortues en danger.

L’engouement de la communauté scientifique internationale en vue de la publication dans le Journal of Virology et le bon sens du comité de bioéthique ont aidé à débloquer la situation. Frédéric Gandar pourra continuer de tenter de mettre au point un vaccin. Dans l’année à venir, les chercheurs pourront déterminer s’ils possèdent le vaccin qui permettra de protéger plusieurs espèces menacées de tortues. Ce vaccin sera offert par l’Université de Liège à toute fondation souhaitant contribuer à la survie des espèces menacées par le TeHV-3.

Testudo hermanni

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