Le site de vulgarisation scientifique de l’Université de Liège. ULg, Université de Liège

Le fédéral n’est plus la voie royale
16/09/2015

L’élu a la bougeotte

European councilCe décret anti-cumul de 2014 a entraîné en Wallonie pas mal de mouvements aux différents étages du pouvoir. Encore un peu plus que d’habitude. C’est qu’en règle générale, l’élu du sud du pays a la bougeotte. Ceci explique sans doute cela : en vingt ans, pas moins de huit élections se sont tenues. Autant d’opportunités d’obtenir de nouveaux mandats. On en revient à la logique à l’œuvre dans la composition des listes, qui misent tout sur des champions locaux (être bourgmestre ou échevin facilite la mobilité, en offrant une position de repli). Ceux-ci enchaînent dès lors les périodes électorales et ne se stabilisent pas longtemps à un poste.

Car ne vous y trompez pas : si certains ténors donnent l’apparence d’une longévité à toute épreuve, beaucoup de carrières politiques sont courtes. Très courtes. La moitié des élus ne dépasse pas les deux mandats enchaînés. La moyenne est même de moins d’un mandat. Ce sont surtout les grandes figures qui perdurent et qui ne cessent de faire des aller-retour entre les échelons. Ce constat vaut également pour la Catalogne. Par contre, en Écosse, le turnover est plus faible. Le système électoral change la donne. Celui qui sera élu sera celui qui aura le plus de voix. Ici, les candidats sont davantage mis en avant que la liste. Surtout, les suppléants n’existent pas. Celui qui voudrait se retirer avant l’échéance ne sera remplacé qu’après des élections anticipées dans la circonscription. Le risque de perdre un siège au profit d’une autre formation est donc réel.

Le parti décide

De toute façon, les élus n’ont pas toujours le choix. Certes, les raisons personnelles peuvent jouer un rôle. Jérémy Dodeigne cite par exemple de jeunes mandataires belges qui avaient siégé au parlement fédéral en 2007-2008 puis qui avaient préféré revenir à la région aux élections de 2009, refroidis par la crise qui s’était éternisée ces années-là. Certains (surtout certaines en Ecosse et en Catalogne) privilégient le régional pour favoriser leur vie familiale, en travaillant plus près que s’ils devaient rejoindre chaque jour la capitale.

Mais l’homo politicus doit souvent s’en remettre aux directives de son parti. Qui va placer ses pions en fonction de plusieurs paramètres. Équilibre géographique, diversité culturelle, parité hommes-femmes, mouvances internes qui doivent toutes être satisfaites (comme à l’époque où le clan « Renaissance » menait la fronde au MR, ou lorsque le PSC s’est mué en CDH)… « En Belgique comme ailleurs, les politiques ne vont pas où ils veulent, résume le chercheur. Chez nous, en 2014, le pourcentage de candidats fédéraux qui auraient voulu être autre part est plus élevé. Cela dit, même quand les personnes ne sont pas là où elles l’auraient voulu, elles reconnaissent que l’échelon où elles se trouvent est important, qu’il compte ».

Mais ceux qui préfèreraient être ailleurs se révèlent-ils pour autant efficaces et impliqués ? Se battent-ils comme ils l’auraient fait s’ils avaient obtenu le poste initialement convoité ? Cela reste à déterminer… « Jusqu’ici j’ai essayé d’expliquer les carrières, mais dans des travaux ultérieurs j’aimerais justement vérifier si la carrière peut expliquer certaines choses, comme la défense de projets particuliers, la motivation, etc. » Le politologue voudrait pareillement s’intéresser à l’avenir aux territoires moins exposés aux dimensions identitaires, ainsi qu’à ceux où le fédéralisme ne date pas d’hier, comme le Canada, l’Australie, les États-Unis… Les trajectoires des élus ont encore beaucoup à révéler.

Page : précédente 1 2 3

 


© 2007 ULi�ge