Le site de vulgarisation scientifique de l’Université de Liège. ULg, Université de Liège

Un arc transpolaire découvert sur Saturne
29/04/2015

Champ magentique Saturne
« En réalité, la reconnexion qui a lieu dans le cycle du processus externe se passe en deux temps. Du côté jour, donc du côté du soleil, les lignes de champ magnétiques de la Terre, ou de Saturne, vont dans une direction, et le champ magnétique solaire dans une autre direction. Les lignes les plus proches les unes des autres vont s’ouvrir, et permettre ce qu’on appelle la reconnexion côté jour. Le champ magnétique de la Terre s’ouvre et ses lignes de champ se connectent avec celles du soleil. C’est le cycle de Dungey, du nom du physicien Anglais qui l’a mis à jour. Ensuite, ces lignes de champ vont se déplacer vers l’arrière et, seulement beaucoup plus loin, dans la magnétoqueue, se reconnecter une nouvelle fois, côté nuit, cette fois. Elles vont se refermer sur elles-mêmes, et les lignes de champ du soleil pourront continuer leur course. En fait, c’est une façon pour le champ magnétique du soleil de contourner un obstacle. 
» Au cours de ce cycle, il arrive que plusieurs lignes de champ se referment d’affilée du côté nuit, alors que peu de lignes de champ s’ouvrent du côté jour. Il y a donc une accumulation d’un flux magnétique du côté nuit, qui reste bloqué dans la queue, qui ne peut plus sortir. C’est cette instabilité qui, dans l’empreinte aurorale, va, au cours de l’accumulation du flux, progresser dans la région polaire et tracer un arc.

« Ce n’est qu’une théorie sur la formation des arcs, mais c’est la plus probable, tant pour la Terre que pour Saturne. Et pourtant, il y a sur Saturne la coexistence de ce processus avec un processus interne, qui rend le cycle de Dungey assez rare. Alors une accumulation de flux, qui signifie plusieurs reconnexions d’affilée, doit être un événement encore moins fréquent à observer. On a eu beaucoup de chance de tomber dessus. Avant son observation, on ne pensait même pas qu’un tel événement pouvait y exister. Cette observation nous autorise en tout cas à penser que si ces arcs sont bien l’effet d’une reconnexion liée aux vents solaires sur Terre, ils le sont aussi sur Saturne, et qu’ils y sont donc plus importants qu’on ne le pensait. »

De plus en plus d’observations

Les premières images d’aurores sur les géantes gazeuses ont été captées par Hubble. En 2004, la sonde spatiale Cassini, développée par la NASA et l’ESA, est entrée en orbite autour de Saturne et a permis des observations plus précises qui ont comblé les attentes de groupes de recherches issus d’un large panel de domaines d’études. Elle a notamment permis de découvrir l’existence des geysers sur Encelade, de récolter de nombreuses données sur la composition des anneaux de Saturne, de mieux comprendre son atmosphère, ses propriétés physiques et climatiques, mais aussi son champ magnétique, sa magnétosphère, et l’incidence qu’elle pouvait avoir sur la formation de ses aurores.

Mais Cassini n’a pas fini de nous émerveiller. « La mission a été prolongée jusqu’à la fin de l’année 2017, s’enthousiasment les chercheurs. Normalement, Cassini tourne autour de Saturne dans le plan équatorial. Mais quand la sonde passe assez près d’un satellite, on peut utiliser son assistance gravifique pour modifier l’orbite et l’incliner vers les pôles. Et pour le « grand final » de la mission, on s’attend à récolter de fantastiques données. On va avoir une orbite quasi polaire. Cette modification de trajectoire va monopoliser les dernières ressources de la sonde. Elle va se rapprocher de Saturne, finir par entrer dans son atmosphère et s’y désintégrer complètement. Mais toute la période qui précédera sa fin va nous permettre d’observer les deux pôles de très près, en détail, avec une définition presque meilleure que celle qu’on obtient pour les observations de la Terre. On aura sur un même plan le côté jour et le côté nuit, et on va observer des phénomènes dont on n’a pas encore conscience aujourd’hui, qu’on ne peut probablement pas encore expliquer, et qui nous permettront d’étayer ou d’abandonner certaines de nos hypothèses. »

Et la fin de Cassini ne signifie pas la fin des observations des aurores des planètes géantes. En 2016, Juno, une nouvelle sonde de la NASA (avec à son bord un instrument auquel le Centre Spatial de Liège a contribué) encore plus performante se mettra en orbite autour de Jupiter  pour prendre la relève. Ces observations ne constitueront qu’un premier pôle de la recherche. Car les chercheurs en sont toujours au stade de la découverte.

Page : précédente 1 2 3 4

 


© 2007 ULi�ge