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Intelligence artificielle et jeux vidéos
16/03/2015

Au cours des dix dernières années, le réalisme des jeux s’est considérablement amélioré, jusqu’à atteindre des performances graphiques qui immergent le joueur dans le monde quasi-réel, mais les performances des systèmes d’IA n’ont pas suivi. D’où une dichotomie.  Du côté graphique, il y a similarité entre la réalité et les jeux ; du côté intelligence, il y a une grosse différence avec la réalité. Et comme les graphismes sont de plus en plus convaincants, la différence s’impose de plus en plus : une forme très réelle, mais qui n’agit pas du tout de manière réaliste ! » Il y a donc incohérence entre le niveau visuel et le niveau d’IA des différents personnages. Pour se démarquer de leurs concurrents, les acteurs du secteur doivent donc « mettre le paquet » sur le développement d’IA beaucoup plus performantes.

Gran turismoEn fait, dans un jeu de course de voitures, par exemple, l’ordinateur ne conduit pas réellement la voiture comme le fait le joueur. Il la guide simplement avec une série de possibilités et d’interdits sans savoir si cela est possible ou nécessaire. Plutôt que de se soucier si la voiture accélère ou décélère avec des valeurs correctes, plausibles, il triche pour ne pas être dépassé par le joueur.  « On a donc l’impression que l’ordinateur triche, ne joue pas avec les mêmes règles que soi, poursuit Damien Ernst. Pour que cela disparaisse, il faut que l’ordinateur considère la voiture comme un autre joueur et utilise un algorithme d’IA pour la conduire, algorithme capable de prendre les mêmes décisions que le joueur humain. » Si l’IA des jeux vidéos est de qualité insuffisante, c’est parce que dans les scénarios de compétition, être humain contre ordinateur, l’être humain est bien meilleur que la machine. Une affirmation qui peut paraître étrange si on se rappelle par exemple les victoires remportées par des ordinateurs sur les meilleurs joueurs d’échec. « Dans des cas comme celui-là, explique Raphael Fonteneau, chercheur FNRS, les IA ont parfois réussi à résoudre le jeu complètement (sans tricher !), mais c’est dans des environnements très structurés, très étroits, où les règles peuvent être définies précisément et sont peu nombreuses ; en outre, la solution du jeu est basée sur la mémorisation des possibilités. Mais quand il s’agit de percevoir un environnement, surtout riche, l’ordinateur est mauvais. Et c’est ce qu’il faut améliorer.»

Base commune

Le travail des chercheurs liégeois et particulièrement de Firas Safadi, dont cela constitue le cœur de la thèse de doctorat, a d’abord été de cerner quels étaient les besoins génériques des développeurs d’IA pour jeux vidéos. Si les développeurs de jeux se passeraient bien de construire une IA à partir de rien pour chaque jeu, ils y sont souvent obligés. Les IA peuvent donner l’impression d’être différentes mais, en réalité, les besoins sont fort semblables. Les chercheurs liégeois ont donc estimé qu’il était possible de créer une IA générique sous laquelle viendrait ensuite se greffer une couche d’adaptation qui fait le lien avec les besoins spécifiques de chaque jeu vidéo. Firas Safadi a travaillé sur cette couche de transition entre les deux (middleware), entre une IA générique et les jeux. Grâce à ses développements, il ne faudra plus décrire une IA spécifique à chaque jeu (ce qui est impossible, et c’est ce qui nuit à la qualité des jeux actuels). Au contraire, les concepteurs de jeux pourront utiliser une IA générique et l’appliquer pour une grande partie des jeux.

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