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Chasse aux pucerons, une histoire de sexe
06/03/2015

Un leurre efficace en laboratoire

Parvenir à formuler ces molécules pour pouvoir les utiliser en agriculture était la seconde étape, et le but avoué de la recherche. Une fois analysé sous tous les angles et bien discerné, le mélange de molécules a pu être reconstitué. Ou presque, puisque la cinquième molécule, l’α‑bulnésène, n’était pas commercialisée. Par chance, elle n’était présente qu’en faibles proportions et son absence au sein de la formulation n’entravait pas l’attractivité du mélange phéromonal de synthèse. La reconstitution fut un succès. Le mélange créé en laboratoire attirait les mâles de manière équivalente à celui produit par une coccinelle vivante. Ils se dirigeaient vers la source, persuadés d’y trouver une partenaire prête à être fécondée.

Tests comportement coccinelle

La clé des champs

Il est maintenant temps de trouver à cette découverte une application pratique sur le terrain. L’idée est de concentrer les coccinelles présentes dans les environs d’un champ là où on a envie qu’elles soient. La simulation de la présence de femelles dans les champs devrait attirer les mâles, et augmenter la population de coccinelles là où elles sont désirées.

Mais pour cela, il faut trouver l’outil adéquat pour pouvoir diffuser au mieux ces odeurs depuis une source précise et voulue. « Nous cherchons à optimiser l’incorporation de ces odeurs dans des diffuseurs, qui pourront être placés dans des zones infestées de pucerons, expliquent les entomologistes. Nous avons plusieurs pistes pour trouver la formulation idéale. Au printemps, nous pourrons tester l’effet de notre mélange au‑delà des murs du laboratoire, et observer ce qui se passe. Dans un premier temps, nous travaillerons à petite échelle, dans des serres, ce qui nous permettra de contrôler un maximum de paramètres. L’extérieur est plus aléatoire. Le vent et l’humidité, par exemple, sont des facteurs contre lesquels nous ne pouvons rien, et qui influenceront probablement nos résultats. »

Mais bien sûr, la destination finale est le plein air. Grâce à la plateforme AgricultureIsLife, Bérénice Fassotte dispose de deux champs pour expérimenter la diffusion des phéromones de synthèse. A l’heure actuelle, les chercheurs ne savent pas comment les mâles réagiront une fois qu’ils se rendront compte qu’ils ont été leurrés. Même si leur réaction en laboratoire était encourageante. Le premier impact à observer sera la présence ou non d’un plus grand nombre de mâles aux endroits ciblés, le deuxième y sera l’hypothétique diminution de pucerons. En plein air, les mâles s’attarderont-ils pour reprendre leur souffle et un peu d’énergie, ou reprendront-ils leur envol ? Une chose est certaine, ils n’obtiendront pas ce qu’ils sont venus chercher. Que ce nouveau système de protection agricole ne permette pas à une espèce envahissante de proliférer est en soi une bonne chose. Et les mâles disposeront en lot de consolation d’un repas de premier choix dont ils auraient tort de ne pas profiter avant de repartir, en quête de vraies coccinelles femelles cette fois, s’ils sont plus chanceux

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