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Les tours des villes
13/01/2015

Aujourd'hui, les tours ne sont pas du tout incontournables. Elle font néanmoins partie intégrante du paysage des grandes métropoles à travers le monde. Chaque continent, chaque pays et même chaque ville a sa propre culture et s'approprie de manière très différente cette morphologie urbaine. Le développement des villes ne s'est pas effectué à la même époque ni de la même manière, ce qui rend les études comparatives intéressantes. « Les grandes villes d'Amérique du Nord se sont développées selon un maillage quadrillé avec un centre d'affaire identifiable par sa verticalité (CBD de gratte-ciel) et une périphérie résidentielle étalée (pavillons ou petit collectif). En Europe, les centres-villes sont davantage marqués par l'histoire religieuse, économique ou politique ; leur tissu urbain est principalement composé d'immeubles de hauteur moyenne donc la disposition des façades forme des « rues canyon ». Les villes sud-américaines reflètent une première influence européenne hispanique (forte densité, compacité, places, etc.) puis un développement sur le modèle des villes nord-américaines (centre vertical et banlieue étalée) », précise Claire Saint-Pierre.

Faire le tour de la question

Dans sa thèse, Claire Saint-Pierre développe plusieurs outils systémiques permettant de définir une insertion urbaine de qualité. Ainsi, elle estime qu'une tour aura plus de chances d'être bien intégrée au paysage si :
- la tour est multifonctionnelle, et en particulier avec un bon apport d'équipements et de services (logements/services ou bureaux/services ou logements/bureaux/services),
- le lien avec l'espace public est correctement traité (ce qu’on appelle "forte adhérence à l'espace public"), en lien notamment avec l'apport en équipements,
- le projet est en adéquation avec les réseaux de transports (compatibilité du profil d'accessibilité propre au site et du profil de mobilité du projet de tour),
- l'impact sur les réseaux de transports n'est pas trop conséquent (pas de saturation ou adaptation du réseau),
- la qualité architecturale est travaillée en adéquation avec les bâtiments environnants (insertion paysagère),
- le choix de la hauteur est bien réfléchi en amont (choix d'un point de repère assumé ou choix d'intégration modérée au skyline),
- les effets de vents générés par la tour sont limités (question de confort des piétons aux alentours de la tour),
- l'incidence solaire est également limitée (pas d'ombre trop conséquente pour les usagers des bâtiments environnants).
Ces critères constituent donc la grille d'indicateurs d'insertion urbaine qui permet d'évaluer la performance urbaine d'une tour, c'est à dire la qualité de son insertion en milieu urbain.

Par ailleurs, il est évident qu’une tour présente des avantages et des inconvénients. Parmi les avantages, on peut évoquer la rentabilisation de l'espace (rentabilisation foncière et fonctionnelle), la participation aux centralités urbaines (concentration d'activités, réduction des déplacements), la possibilité d'intégrer des fonctionnalités en centre-ville, la symbolique et l'image qu'elle peut revêtir, ou encore la diversité d'échelles qu'elle met en perspective. Parmi les inconvénients, pointons le coût de construction et les charges de fonctionnement élevés (dus aux technologies nécessairement présentes pour l'usage de la tour), les impacts sur le confort des usagers (effets de vent, ombre portée, confinement), les difficultés de réalisation (cadre réglementaire et spécialisation fonctionnelle des investisseurs).

Tours

La tour prend le pion…

Les prises de décisions sont partagées entre la maîtrise d'ouvrage (investisseurs publics ou privés), l'entité responsable de la réglementation urbaine de la zone d'implantation de la tour (collectivité ou aménageur) et la maîtrise d'œuvre (architectes, urbanistes, ingénieurs). La méthode de traitement s’effectue largement en amont, avant même de savoir à quel endroit la tour doit être implantée. Elle permet de comparer plusieurs sites d'implantation pour en choisir le meilleur. Cependant, elle est également utilisée tout au long du processus et peut même être appliquée sur un projet de tour déjà construit. « Les choix et décisions relatives à la question des tours ne doivent pas être négligés du fait de leur ampleur en termes de programmation et de financement, mais aussi en raison des impacts qu'elles génèrent à l'échelle du quartier, de la ville ou de la métropole. Le processus d'implantation de tours doit se faire sur le long terme de manière stratégique et coordonnée, en concordance avec le développement des transports », explique Claire Saint-Pierre. Et d’ajouter : « Si une ville est encore vierge de toute tour, la place la plus judicieuse pour y établir le premier édifice vertical sera dans un quartier mixte, proche d'un nœud de transport. Ou dans un quartier nécessitant un renouvellement urbain, mais dans ce cas, la tour doit être un élément parmi d'autres au sein d'un projet urbain plus large ».

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