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Nouvelle menace pour la couche d’ozone ?
05/11/2014

Depuis que la sonnette d’alarme a été tirée durant les années 1980, la couche d’ozone, jusqu’alors abondement détruite par l’activité industrielle, a entamé une timide régénération. Cependant, à l’initiative d’Emmanuel Mahieu, un chercheur de l’Université de Liège, une équipe internationale a observé qu’entre 2007 et 2011, la tendance caractérisant son principal destructeur –le chlore– s’était à nouveau inversée, montrant une augmentation dans l’hémisphère nord (1). Ce nouveau déséquilibre n’aura cependant été que temporaire. De plus, il n’était pas lié à une émission humaine, mais bien à une variation inattendue de la circulation atmosphérique, qui a pu être modélisée par les chercheurs. L’observation prouve que le rétablissement de la couche d’ozone ne suit pas docilement une courbe rectiligne liée à nos politiques environnementales, qui semblent au demeurant efficaces. D’autres facteurs entrent en compte. L’étude a suscité l’intérêt de la communauté scientifique et est aujourd’hui publiée dans la revue Nature.  

Il n’est pas nécessaire d’être un militant écologiste bien informé pour avoir entendu parler de la couche d’ozone, et de son émiettement par l’émission de certains gaz issus d’activités industrielles et domestiques au cours de ces soixante dernières années. Le chlore, le brome, l’azote, tous ces composés sont pointés du doigt. Depuis plus de trente ans, la problématique est au centre des débats. Car l’ozone nous protège des rayons UV du soleil, hautement nocifs, et sa disparition de l’atmosphère aurait eu des répercutions catastrophiques. Il n’y a plus lieu de paniquer cependant, puisque globalement, depuis une vingtaine d’années, on observe une diminution des rejets de gaz destructeurs d’ozone. Mieux encore, les derniers rapports concluent que vers 2050, la concentration d’ozone devrait avoir retrouvé son niveau d’avant 1980.

Pourtant, Emmanuel Mahieu, chercheur au sein du Groupe Infra-Rouge de Physique Atmosphérique et Solaire (GIRPAS) de l’Université de Liège, a observé une étrangeté dans les données recueillies à la station du Jungfraujoch, en Suisse. Alors que les composés chlorés, destructeurs de l’ozone, disparaissent progressivement de la troposphère, la quantité de chlore a augmenté dans la stratosphère entre 2007 et 2011, au niveau de l’hémisphère nord. Ce phénomène inattendu n’était pas lié à l’activité humaine, mais à la circulation atmosphérique. Une étude intéressante qui souligne le succès des politiques mises en œuvre à la fin des années 1980, mais qui mérite au préalable un petit détour pour mieux comprendre les propriétés chimiques qui influencent la composition de la couche d’ozone.

La formation de la couche d’ozone

L’ozone est une molécule composée de trois atomes d’oxygène (O3). C’est un gaz assez dynamique, qui se forme et se détruit continuellement, mais selon un cycle naturel qui sur notre planète permet d’en préserver une couche constante et protectrice. C’est sous les tropiques qu’il se forme en masse, justement sous l’effet desUV. Phénomène chimique qu’on appelle la photolyse.

Formation ozone
L’énergie des rayons UV rompt des molécules de dioxygène (O2) naturellement présent dans l’atmosphère. Les atomes d’oxygène, une fois libérés, s’assemblent à nouveau. Soit en dioxygène, ce qui ne change rien, soit en ozone. Si elles restaient au niveau des tropiques, ces molécules seraient également détruites et recomposées dans un cycle sans fin. Car l’énergie qui permet de délier les atomes de dioxygène permet également de délier les atomes d’ozone. « Mais la dynamique atmosphérique fait que ces molécules d’ozone migrent vers les pôles, explique Emmanuel Mahieu. Et pendant les nuits polaires, qui durent plusieurs mois par an, cet ozone est stocké. Il n’y a plus de lumière pour le détruire. Il s’y concentre, s’accumule, et les pôles agissent comme de véritables réservoirs. Quand la lumière revient au printemps, la dynamique atmosphérique se remet en route, et l’ozone est redistribué dans les deux hémisphères. »

(1) Mahieu, E. et al., Recent Northern Hemisphere stratospheric HCl increase due to atmospheric circulation changes, Nature, 6 novembre 2014, doi :10.1038/nature13857 .

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