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Les eaux souterraines en Belgique
26/09/2014

Durant l’été, elle a donc l’occasion de réchauffer légèrement et localement l’aquifère… gain de chaleur qui peut être le bienvenu lorsqu’en hiver, on pompera dans cette même nappe aquifère pour réchauffer les bâtiments. Elle se refroidira alors et retournera au sous-sol plus froide, prête à recommencer son cycle ! Ce système peut être considéré comme une sorte de stockage d’énergie dans le sous-sol. Mais il ne faut pas que les terrains soient trop perméables sinon l’écoulement de l’eau souterraine est trop rapide…. emportant  les précieuses calories. Néanmoins il faut une perméabilité minimum pour permettre le pompage d’un débit suffisant… donc tout est question d’équilibre. « Trouver ces bonnes conditions hydrogéologiques nécessite une caractérisation fine des terrains, et cela n’est pas toujours bien perçu par les bureaux d’études, les entrepreneurs et les maîtres d’œuvres,  explique Alain Dassargues. C’est pourquoi nous avons consacré un chapitre sur ce sujet et relatons des expériences pilotes que nous menons dans la plaine alluviale de la Meuse. Mais du côté wallon, le problème est aussi juridique : la législation qui encadre les pompages d’eau est presqu’exclusivement inspirée du cas de pompage d’eau potable. Or ici, l’usage est très différent et il me semble que certaines des  précautions prévues pour un pompage d’eau destinée à la consommation devraient pouvoir être assouplies. En Région wallonne, nous avons  une législation très stricte  pour protéger la ressource en eaux souterraines et c’est très bien. Mais actuellement cela freine le développement de la géothermie avec pompage et réinjection. C’est à mes yeux un principe de précaution appliqué de manière un peu trop rigide. En attendant, beaucoup plus d’installations géothermiques de basse température avec pompage et réinjection voient le jour dans les régions voisines qu’en Wallonie. »

Carte hydrogeologique B

Hydrogéologie et mines

Deux autres chapitres s’attardent sur les liens entre gestion des aquifères et anciennes mines de charbon. Côté flamand, c’est évidemment la situation dans le Limbourg qui est examinée tandis que côté wallon, c’est le bassin de Liège. « On ne se rend pas toujours compte de ce que l’exploitation minière signifie au niveau hydrogéologique, explique Alain Dassargues. Lorsque les mines ont fermé, on a laissé remonter naturellement les niveaux d’eau de la nappe aquifère dans un massif désormais très fracturé et dans lequel des anciennes galeries plus ou moins effondrées/colmatées peuvent jouer le rôle de drains non permanents. Depuis lors, on a pu assister à des phénomènes tels que des irruptions ponctuelles d’eau dans certaines zones en pied de versant dans la vallée de la Meuse (comme par exemple à Cheratte en 2002 lorsqu’un coup d’eau a brutalement inondé le centre de la localité), une extension de la zone où des infiltrations se produisent dans les caves ou encore des signes d’instabilité de certains versants. La remontée des niveaux d’eau dans l’ancien massif exploité peut également créer des problèmes de qualité d’eau, y compris dans la nappe aquifère contenue dans les dépôts alluviaux de la Meuse  (Jupiler ne pompe plus, ou pompe nettement moins, dans la plaine alluviale de la Meuse car l’eau y est désormais plus riche en sulfates !) « Tout cela est très complexe et difficile à caractériser, explique Alain Dassargues, mais sur base des données de l’ISSEP on a construit des modèles spécifiques pour simuler le comportement de ces aquifères très particuliers ».

Restent deux questions qui se posent au terme de l’ouvrage : que peut-on dire de l’état de nos nappes aquifères ?
Au niveau de la quantité il y a deux aquifères qui ont subi (et subissent encore) les effets d’une surexploitation. Le premier est l’aquifère des calcaires (du Carbonifère) dans le Tournaisis mais depuis 15 ans, il y a concertation entre la Wallonie, la Flandre et la France pour réguler son exploitation, ce qui a permis (grâce notamment à de gros investissements comme celui de la ‘Transhennuyère’) une remontée de la nappe. L’autre aquifère surexploité est la nappe du Socle en région flamande, qui va de Bruxelles à Ostende. Elle a été surexploitée de façon importante jusqu’il y a une dizaine d’années : le niveau est aujourd’hui à -200 m alors que l’eau était initialement à -30m ! Mais là aussi, des mesures de régulation ont été prises. «Pour le reste, précise Alain Dassargues, il n’y a pas de problème de quantité chez nous, surtout pas en Région Wallonne. Du point de vue de la qualité, cela a fort évolué. On a commencé à parler de pollution des nappes dans les années 1980. On sait que le principal problème, ce sont les nitrates mais il y a aujourd’hui aussi des traces de produits phyto-sanitaires et de polluants appelés ‘émergeants’ comme certains produits pharmaceutiques, des drogues, … dont certains ne se dégradent pas ou peu. Mais il faut dire qu’on dispose aujourd’hui de méthodes analytiques qui permettent de déceler de très petites concentrations. Il faut cependant reconnaître que nous avons des eaux d’excellente qualité en Belgique. Cela ne nous empêche évidemment pas de rester très vigilants et à l’avant-garde en termes de surveillance et d’anticipation des problèmes potentiels».

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