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Des enfants incarcérés avec leur mère
11/09/2014

La grossesse en prison

Certaines détenues arrivent enceintes en prison, d’autres le deviennent au cours de leur incarcération. Sur les 39 femmes rencontrées, 10 ont accouché en prison. Pour donner naissance à leur enfant, les femmes sont transférées à Bruges. L’accouchement se fait dans un hôpital proche de la prison qui a l’habitude de gérer ces situations. Ensuite la femme rejoint la prison de Bruges pour quelques jours ou quelques semaines. “Le transfert vers la prison peut même se faire quelques heures seulement après que la femme ait accouché.  Ce retour est plus ou moins mal vécu par certaines détenues. Il peut être anxiogène parce que certaines ne parlent pas la langue ou parce que leur famille est trop éloignée pour leur rendre visite. Mais il n’y a pas de tendance générale, certaines sont satisfaites, d’autres pas”, observe Salim Megherbi.

“Le plus difficile à Bruges, c’est l’éloignement. Il s’écoule parfois deux à trois jours avant que le père ne voit son enfant et parfois un mois avant qu’une détenue rejoigne sa prison d’origine et que la grand-mère puisse voir son petit-fils ”, souligne Stephanie Linchet.

Et là n’est pas le seul problème. Si le transfert vers la prison de Bruges est prévu et plus ou moins bien organisé, pour le reste, il n’y a pas de protocole établi. “Le matériel ou le personnel disponibles pour le suivi de la grossesse ou l’accouchement varient d’une détenue à l’autre”, poursuit la chercheuse.
Dans certaines prisons, le matériel pour le suivi de la grossesse est vétuste; les femmes sont donc suivies dans des hôpitaux en dehors de la prison tandis que dans d’autres établissements, il est de meilleure qualité que dans certains hôpitaux et les médecins estiment qu’ils peuvent y suivre les femmes de manière plus optimale.

Là où le suivi n’est pas optimal, certaines femmes font appel à un médecin extérieur. A leurs frais.

Des mères regroupées entre elles

L’accueil des enfants en prison est, ainsi que nous le disions, possible jusqu’à l’âge de trois ans. Mais les infrastructures carcérales ne sont a priori pas faites pour accueillir des enfants et rien ne stipule les conditions dans lesquelles ceux-ci doivent être accueillis. A nouveau, la situation diffère d’une prison à l’autre.

“A Mons, la situation était catastrophique au moment de l’enquête. Aujourd’hui, cette prison n’accueille plus d’enfants parce qu’il n’y avait rien de prévu. A Lantin et à Berkendael, c’est bien organisé”, déclare Salim Megherbi.

A Lantin, les femmes avec enfant(s) sont rassemblées dans une partie d'une aile. Elles ont accès à un espace de jeux, une cuisine et des sanitaires. “Lorsque nous avons mené l’enquête, il y avait 3 cellules de mères”, se rappelle Stephanie Linchet. Les mères ont également accès au préau à des moments bien précis où elles ne sont qu’entre elles.

Aidées par leurs co-détenues

A Berkendael,  les cellules pour les mères avec enfant(s) sont plus grandes mais elles ne sont pas séparées des autres. De même, les sorties au préau pour les mères et les autres détenues se font au même moment. Les femmes avec enfant(s) peuvent juste sortir dans le couloir qui longe les cellules quand il n’y a personne. Autre particularité propre à Berkendael, les mères peuvent, si elles le souhaitent, partager leur cellule avec une autre détenue. Une mère peut ainsi être aidée par sa co-détenue qui gardera l’enfant lorsqu’elle doit s’absenter pour travailler par exemple. “Ce sont surtout les femmes originaire d’Amérique latine qui choisissaient cette option”, note Stephanie Linchet.
A Lantin, au contraire, une femme avec enfant n’a pas le droit de travailler.

Les deux systèmes ont leurs avantages et leurs inconvénients. “Le système mis en place à Berkendael offre un relais aux mères. Sans cela, elles seraient 24 heures sur 24 avec leur enfant. Ce relais leur permet de souffler, d’aller au travail...”, estime Salim Megherbi.“A Lantin, elles sont tout le temps entre mères. Ca peut causer des tensions”, acquiesce Stephanie Linchet.

“Mais le système instauré à Berkendael impose de trouver un soutien de qualité. Que se passe-t-il s’il y a un problème avec la personne de ressource? Je ne systématiserais pas le concept de Berkendael ; même s’il faut offrir des moments d’échappée aux mamans”, met en garde Salim Megherbi.

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