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Des enfants incarcérés avec leur mère
11/09/2014

En Belgique francophone, le nombre de mères incarcérées avec leur enfant n’était pas connu jusqu’à présent. Dans notre pays, les femmes peuvent garder leur enfant avec elle jusqu’à ce qu’il ait 3 ans. Comment cela est-il vécu? Que devient ensuite l’enfant? On sait peu de choses sur tous ces enfants dont les mères sont incarcérées.  Partant de ce constat, le Fonds Houtman (de l’ONE) a commandité une enquête sur les enfants de 0 à 6 ans dont la mère est incarcérée. Celle-ci a été menée par deux chercheurs de l’Université de Liège, Stephanie Linchet et Salim Megherbi, sous la direction de Marie-Thérèse Casman, Laurent Nisen (Panel Démographie Familiale) et Frédéric Schoenaers (Centre de Recherche et d’Interventions Sociologiques).

Enfant prisonEn Belgique, trois établissements pénitentiaires accueillent les enfants des mères incarcérées: Lantin, Mons et Berkendael. Au niveau légal, il est stipulé que les relations familiales doivent être maintenues. Mais aucun texte ne précise les conditions nécessaires pour ce faire.

L’étude (1), commanditée par le Fonds Houtman (de l’ONE), s’est déroulée entre octobre 2011 et décembre 2013 et a pris en compte trois aspects: sociologiques, psychologiques et juridiques. Au niveau sociologique, il y avait un premier constat: l’absence de chiffres concernant le nombre d’enfants et de mères concernées.

“Les études se sont fort intéressées aux pères car ils sont plus nombreux mais il n’y avait pas de données concernant le nombre d’enfants”, explique Stephanie Linchet du Panel de démographie familliale. “Lorsqu’une femme entre en prison, on lui demande si elle a des enfants mais c’est purement informatif; il n’y a pas de vérification”, précise Salim Megherbi du Centre de recherche et d’interventions sociologiques (CRIS).

En Belgique, 83% des enfants dont le père est en prison sont pris en charge par leur mère alors que seuls 25% des enfants dont la mère est incarcérée vivent avec leur père.

Les chercheurs se sont donc rendus dans les trois prisons pouvant accueillir des enfants et ont soumis les femmes à un questionnaire. Etant donné que c’était la première fois qu’un comptage avait lieu, les chercheurs en ont profité pour interviewer toutes les mères ayant des enfants de 18 ans ou moins. 83 mères ont répondu au questionnaire.

39 mères

Ensuite, les chercheurs ont poursuivi leur travail avec les mères ayant des enfants de 0 à 6 ans au moment de l’étude. Certaines ont accepté de répondre au questionnaire mais pas aux interviews visant à connaître leur parcours, leurs réflexions sur la maternité en prison... Finalement, 39 mères ont participé à toute l’enquête. Celles-ci ont au total 56 enfants. 11 d’entre eux ont vécu en prison.

“Nous avons un taux de réponse de 56%. C’est assez positif car les prisonniers sont en général assez méfiants vis-à-vis de ceux qui veulent les interroger. Mais nous avons fait du porte-à-porte pour leur expliquer notre démarche.”,  confie Salim Megherbi. “Nous leur avons dit que ce n’était pas pour les contrôler. On avait aussi un badge visiteur afin de nous différencier du personnel de la prison. Certaines pensaient que ça pourrait améliorer leur situation mais nous avons relativisé en précisant que cela aurait des conséquences à moyen et long terme”,  raconte Stephanie Linchet.

(1) Les enfants de 0 à 6 ans dont la mère est incarcérée en Fédération Wallonie-Bruxelles, Fonds Houtman-Université de Liège, mais 2014.

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