Le site de vulgarisation scientifique de l’Université de Liège. ULg, Université de Liège

Restimuler la conscience évanouie
28/05/2014

Une amélioration clinique a été mise en évidence chez 43% des patients en état de conscience minimale après stimulation par tDCS. « Autrement dit, ces patients manifestèrent des signes de conscience qui n'avaient jamais été observés chez eux auparavant, explique Steven Laureys. Nous avons même pu établir une communication fonctionnelle avec deux d'entre eux. Nous leur avons posé six questions simples telles que "Est-ce que je touche mon nez ?", et ils ont répondu correctement à chacune d'elles, soit en bougeant la tête, soit par le regard. »

Un élément prédictif

Pour Aurore Thibaut, premier auteur de l'article(1) publié sur ces travaux dans la revue Neurology, « ces résultats sont d'autant plus impressionnants qu'ils peuvent survenir chez des patients chroniques, c'est-à-dire des années après leur accident, alors que leur état est trop souvent considéré comme ne pouvant plus évoluer. » Et d'ajouter : « Au contraire, notre étude montre que l'état de conscience des patients sévèrement cérébrolésés peut progresser à la suite d'une courte stimulation corticale. Cependant, cette amélioration n'est que temporaire  et les patients retrouvent leur état initial après quelques heures. »

scores-tdcsLes patients en état végétatif/non répondant ne tirent aucun profit de la stimulation transcrânienne à courant continu. Et si 43% des patients en état de conscience minimale connaissent une amélioration temporaire, 57% y restent hermétiques. Pourquoi ? Les chercheurs du Coma science Group essaient actuellement de trancher cette question. D'ores et déjà, Aurore Thibaut a apporté de premiers éléments de réponse. En effet, elle a montré, au moyen de la tomographie par émission de positons (PET scan), que les patients qui répondent à la tDCS sont ceux qui conservent une activité métabolique dans une des deux régions ciblées par le courant propagé, en l'occurrence la région préfrontale gauche. La présence de cette activité métabolique sauvegardée serait un élément prédictif de l'efficacité de la stimulation. Reste toutefois à élucider les effets moléculaires de la tDCS pour en percer la mécanique intime.

Quel impact à long terme ?

Pour l'heure, les chercheurs du Coma Science Group étudient l'impact de stimulations répétées (20 minutes par jour pendant une semaine) chez les patients en état de conscience minimale réceptifs à la tDCS.  L'objectif poursuivi est de prolonger et de maintenir à long terme les bénéfices engendrés par cette technique sur les habiletés cognitives et motrices des personnes concernées. « La facilité d'utilisation et le coût peu élevé de cette nouvelle technique en font une bonne candidate pour la pratique clinique quotidienne en revalidation afin de stimuler la récupération des patients qui survivent à un coma », dit le professeur Laureys. Il ajoute qu'elle pourrait également être utile pour améliorer l'évolution des patients plongés dans un état de conscience minimale chronique.

On croyait communément que le cerveau perdait toute plasticité au-delà de la phase aiguë d'un état de conscience altéré. Les travaux du Coma Science Group soulignent qu'il n'en est rien, qu'il conserve une certaine plasticité durant des années. « Il ne faut pas en déduire que tout est possible, insiste le responsable de l'équipe liégeoise. La réalité clinique est celle de patients qui demeurent très handicapés. Aussi notre découverte ne relance-t-elle pas fondamentalement le débat sur la fin de vie des patients en état de conscience altéré chronique. »

(1) Aurore Thibaut, Marie-Aurélie Bruno, Didier Ledoux, Athena Demertzi, Steven Laureys, tDCS in patients with disorders of consciousness: sham-controlled randomized double blind study, Neurology, 2014 Apr 1;82(13):1112-8.

Page : précédente 1 2 3

 


© 2007 ULi�ge