Chez des souris atteintes de la maladie d’Alzheimer, la surexpression de la protéine ITPKB entraîne une aggravation de la maladie. De plus, son inhibition dans des neurones de souris en culture limite la production de peptides amyloïdes responsables de la formation des plaques séniles. Le Professeur Stéphane Schurmans, directeur du Laboratoire de Génétique Fonctionnelle au GIGA de l’Université de Liège, révèle le fruit de ses investigations dans une étude publiée dans Brain.
Les gènes détiennent l’information nécessaire à la fabrication des protéines, éléments essentiels à la vie de nos cellules et donc à la vie tout court. Le séquençage d’un gène permet de connaître la composition de la protéine qui y est associée mais pas sa fonction. Or les protéines peuvent avoir une multitude de rôles différents au sein de la cellule puisque l’immense majorité des fonctions cellulaires est assurée par celles-ci. Elles peuvent ainsi jouer un rôle structurel, catalytique, de régulation de la compaction de l’ADN, dans la mobilité de la cellule ou encore dans l’expression des gènes.
Pour étudier la fonction des gènes et des protéines pour lesquelles ils codent, les scientifiques utilisent différentes techniques. « Par exemple pour les enzymes, on peut s’intéresser aux substrats auxquels elles se lient, ou au produit qui découle de la réaction que l’enzyme catalyse mais aussi à la vitesse de cette réaction ou encore tenter de déceler où cette enzyme est exprimée. Toutes ces données permettent d’obtenir des informations sur la fonction de cette protéine », explique Stéphane Schurmans, Directeur du Laboratoire de Génétique fonctionnelle au GIGA de l’Université de Liège. « Mais le nec plus ultra est de pouvoir étudier la fonction des gènes in vivo, c’est-à-dire au niveau d’un animal entier et vivant » poursuit-il. Et c’est précisément le domaine de recherche de Stéphane Schurmans depuis 1992. Ce dernier modifie génétiquement des souris de laboratoire afin d’obtenir des lignées de souris knock-out pour des gènes ciblés, c’est à dire chez lesquelles un gène particulier est invalidé. Une quinzaine de souris knock-out ont ainsi été générées par le laboratoire.
Du système immunitaire au système nerveux
En 2003, Stéphane Schurmans et son équipe obtiennent les premières souris knock-out pour le gène ITPKB (Inositol 1,4,5 Triphosphate 3-Kinase B). « Nous avons alors découvert que ces souris présentent un phénotype particulier puisqu’elles n’ont pas de lymphocytes T en périphérie, c’est-à-dire au niveau des ganglions et de la rate », reprend Stéphane Schurmans. Des études complémentaires ont permis de montrer que d’autres cellules du système immunitaire, tels que les lymphocytes B, les neutrophiles, les cellules myéloïdes et les mastocytes, étaient également altérées chez les souris knock-out pour ITPKB. « Ces résultats démontrent l’importance du rôle de l’enzyme ITPKB dans le système hématopoïétique et dans le système immunitaire », indique le chercheur. Ainsi, les souris knock-out pour ITPKB ont, en toute logique, servi à l’étude de la fonction de l’enzyme ITPKB au sein de ces systèmes biologiques.