Le site de vulgarisation scientifique de l’Université de Liège. ULg, Université de Liège

Les Initiatives Populaires de Solidarité Internationale
18/12/2013

En partant du principe que les Initiatives populaires de solidarité internationale n’ont jamais cessé d’exister, on considèrera que les Organisations Non Gouvernementales agréées, actrices légitimes de l’aide (publique) belge au développement sont issues de ce vivier associatif. Elles y ont fourbi leurs premières armes, connu leurs premières réussites et leurs premières déceptions. Elles ont tenté d’innover, de créer, de (ré) inventer des pratiques solidaires. Ne pas prendre en considération l’existence des IPSI sous prétexte d’amateurisme et de dérive sentimentale de l’aide serait se couper de ce vivier d’où émergeront de nouvelles pratiques solidaires, de nouveaux projets, de nouveaux acteurs.

Les IPSI, un rôle complémentaire aux ONG

La force d’innovation des IPSI réside dans leur capacité à prendre en charge la gestion d’un problème identifié par ou avec leurs partenaires au Sud mais non ou insuffisamment pris en considération par les projets et programmes des ONG agréées. Négliger les IPSI, c’est oblitérer à la fois cette capacité d’innovation et, en bout de compte, le rôle complémentaire que jouent ces structures dans le champ de la coopération internationale. Enfin, le contexte actuel offre un terreau important favorisant le renouvellement de l’engagement citoyen pour un Autre lointain. S’opposer aux IPSI, c’est s’attaquer à une lame de fond qui dépasse largement le simple cadre de la coopération Nord/Sud.

L’intérêt renouvelé pour les initiatives citoyennes ou populaires en faveur de la solidarité internationale provient ainsi du challenge que l’existence-même de ces IPSI pose au modèle de coopération non gouvernementale belge. L’idéologie libérale mais aussi les attaques incessantes dont l’appareil d’Etat fait régulièrement l’objet quant à son train de vie ainsi que la nécessité « évidente » de mener des politiques d’austérité budgétaire en cette période de crise interminable, semblent alimenter un terreau favorable au Do It Yourself si bon marché et à la responsabilisation/valorisation de l’initiative privée, que ce soit dans le domaine de la coopération internationale ou au-delà. Les IPSI nous forcent ainsi à réfléchir à la redéfinition du lien entre l’initiative privée en matière de solidarité internationale et l’Etat qui se cristallisait  jusque-là autour des mécanismes d’agrément.

Depuis l’avènement, dans le domaine de la coopération internationale belge, des ONG et, corollairement, la mise en place puis les réformes successives des mécanismes de co-financement et d’agrément, le modèle reposait sur une polarisation de l’aide non gouvernementale vers… l’Etat. L’importance des fonds publics dans les budgets des ONG belges (surtout francophones)  est témoin de l’importance vitale du mécanisme de co-financement pour la pointe de la pyramide associative de la solidarité internationale. La reconnaissance publique via l’obtention de l’agrément ONG agit comme le principal agent de légitimation de l’action non gouvernementale. L’agrément ne sert pas seulement à se faire identifier comme partenaire de l’Aide au Développement belge mais autorise également son titulaire à se considérer comme un acteur professionnel. Au-delà de cet agrément, point de salut. Tout se passe un peu comme si aujourd’hui, il était impossible d’être à la fois un acteur professionnel de l’aide non gouvernementale sans disposer de l’agrément qui n’est, en soi, que la reconnaissance par le gouvernement d’une possibilité de financement. Une liaison évidente est ainsi apparue entre le financement public, la reconnaissance institutionnelle, le contrôle public et le niveau de professionnalisme.Win-Win

En les prenant pour des objets d’étude en tant que telles, les IPSI soulèvent bien des questions et forcent à redéfinir les lignes de force de notre coopération non gouvernementale. L’Etat (du gouvernement fédéral aux entités fédérées) est-il le seul agent de légitimation des acteurs de la coopération non gouvernementale ? Peut-on être professionnel de l’aide sans reconnaissance ni contrôle des pouvoirs publics ? Les organisations de la société civile ne doivent-elles pas chercher à s’autonomiser en veillant à définir des critères propres de professionnalisme voire créer leurs propres mécanismes de contrôle ?

Page : précédente 1 2 3 4 5 suivante

 


© 2007 ULi�ge