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Farine de roche
26/09/2013

Deuxième caractéristique importante, la coupe ne rend pas compte de la texture des intercroissances dans la troisième dimension de la particule, qui peut être tout autre. « C’est un principe de base de la stéréologie. Prenons un gâteau avec des couches de vanille et de chocolat, illustre le chercheur, si je coupe le gâteau dans sa transversalité et que j’observe une couche de vanille, je ne peux pas déduire qu’il est constitué de 100% de vanille. Une seule coupe ne nous apprend rien. Il faudrait plusieurs coupes d’une même particule, mais c’est impossible. Dès lors, comme on étudie plusieurs particules, on effectue des coupes aléatoires. »

L’établissement de plusieurs indices a permis de mieux classer les particules en fonction des deux problèmes soulevés ci-dessus, et de mieux diagnostiquer la nature d’un gisement pour une meilleure exploitation économique. « Le premier indice, issu du calcul des pixels, permet de rendre compte de la proportion volumique, et établit donc le pourcentage de chalcopyrite dans la particule. Le deuxième indice est celui de l’exposition en surface. Quand la technique de séparation utilisée est la flottation, par exemple, il faut que les minéraux hydrophobes soient à la surface de la particule pour que celle-ci adhère aux bulles et remonte à la surface. » Une particule de type couronne, par exemple, pourrait contenir 80% de chalcopyrite et ne pas remonter.

Ces deux premiers indices permettent déjà de rendre compte de la manière dont des particules pourraient réagir au broyage et lors de la phase de séparation. Mais ce n’est pas encore suffisant pour les classer en familles. Par exemple, les veines et les émulsions auront des indices similaires, à savoir un même pourcentage de chalcopyrite, et une faible exposition en surface. « Pour obtenir une vision encore plus précise, nous envoyons également des lignes au hasard. Ensuite, on mesure la longueur traversée, et on regarde quelles distances sont parcourues dans des phases jaunes, donc de chalcopyrite, et à quelle fréquence. » Dans le cas où les phases jaunes sont courtes et nombreuses, on sera en présence d’une particule de type émulsion, dans le cas où ces phases jaunes sont longues et peu nombreuses, la particule sera veinée, etc. « Tous ces indices permettent des manières différentes de calculer et d’identifier des textures de particule. Cela peut sembler rébarbatif, mais l’addition de ces résultats permet une analyse statistique de comparaison et de classification plus précise de toutes ces particules en familles identifiables. Ce qui permet une meilleure exploitation de la matière première. »

Particules minerai

Au-delà des textures de roches

L’article s’inscrit dans une recherche bien plus large. Eric Pirard a en effet pour ambition de développer un microscope optique automatisé dédié aux besoins de l’industrie minérale, et ainsi mettre au point une technique commercialisable de quantification des minéraux.

Le chercheur invoque également ses connaissances pour améliorer les conditions de recyclage des métaux. « Les techniques de broyage qui fonctionnent pour les roches fonctionnent également pour les GSM, ou pour les panneaux photovoltaïques, par exemple, » développe le scientifique. Les contraintes et les problèmes rencontrés sont les mêmes. Il faut parvenir à libérer les différents métaux pour un coût économique et énergétique le plus faible possible. Et en regard de la croissance exponentielle de l’humanité et de son outillage, et particulièrement des pays en voie de développement, il est primordial, pour le chercheur, de se pencher sur les deux tableaux. Entre ingénierie et géologie, entre recyclage et exploitation de la roche. « On a parlé de la fermeture des mines en Europe, s’amuse le chercheur en s’autorisant une petite projection dans le futur. Je prédis l’avenir en disant qu’on va en rouvrir sans tarder. »

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