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Un vaccin contre la maladie associée à la migration du virus des gnous
03/07/2013

Le vaccin du hasard

L’étude de ce singulier virus passionne Benjamin Dewals , chercheur qualifié FNRS au département d’immunologie et de vaccinologie de la faculté de médecine vétérinaire de l’ULg, depuis plus de dix ans. Lorsqu’il entama sa thèse de doctorat sur ce sujet en 2002, son objectif  était d’apprendre à connaître tous les secrets de cette pathologie. Tant et si bien qu’il a fini par découvrir… un vaccin ! « Les lois du hasard », sourit-il modestement.

Mais sa découverte est loin d’être modeste. « Elle aura sa place dans les livres de référence de virologie, prédit Alain Vanderplasschen, qui a supervisé ses recherches. Benjamin a fourni un travail impressionnant. Il ne s’est pas contenté de venir mettre sa cerise sur le gâteau en utilisant des techniques développées par d’autres. Il a dû élaborer ses propres outils pour obtenir des résultats. Certaines thématiques qui concernent directement l’homme (le cancer, l’asthme, etc.) trouvent souvent plus d’écho au niveau du grand public… » Les investigations scientifiques du département vétérinaire ont à tout le moins attiré l’attention de la revue américaine PNAS (Proceedings of the National Academy of Sciences), qui leur a consacré dix pages dans leur édition de mai (1).

L’herpèsvirus alcélaphin 1 n’a rien d’une découverte. « J’en avais entendu parler pour la première fois en 1986 », se souvient Alain Vanderplasschen. S’il agite les esprits des spécialistes depuis belle lurette, c’est parce que sa singularité est assez rare. Seul un autre virus au monde s’adapte parfaitement chez son hôte-réservoir mais induit des syndromes foudroyants chez d’autres espèces : la maladie d’Aujeszky, inoffensive pour le porc mais provoquant des encéphalites fulgurantes chez certains carnivores et ruminants.

Cul-de-sac épidémiologique

Mais l’AlHV-1 possède une spécificité supplémentaire : sa latence. Au début de leur étude, grâce à des expérimentations sur des lapins, Benjamin Dewals et l’équipe liégeoise ont constaté une caractéristique étonnante. « Une fois l’animal atteint, il meurt mais est incapable d’aller le transmettre à un autre. C’est un cul-de-sac épidémiologique !, décrit-il. Cela nous interpellait, car on observait une lymphoprolifération, une prolifération de lymphocytes. La charge virale en termes d’ADN augmente de manière exponentielle. Nous nous sommes dès lors demandé si l’infection que l’on voit croître n’était pas due à une infection latente. »

Linfection par l’herpèsvirus  alcélaphin 1 ne se transforme donc en fièvre catarrhale maligne qu’au bout d’un certain temps. Mais avant de se déclarer, il provoque chez les vaches une multiplication effrénée des globules blancs.  Autrement dit, le virus ne se réplique pas lui-même. Ce sont au contraire les cellules infectées qui se propagent. « Il infecte un animal, ne dit plus rien pendant des semaines et puis d’un coup ! On constate une explosion d’ADN viral qui n’est même pas associée à une réplication virale », résume Alain Vanderplasschen.

Un constat qui va à l’encontre de la majorité des théories formulées jusqu’alors. La plupart des scientifiques affirmaient généralement que très peu de cellules étaient infectées. Certains avançaient même qu’il ne fallait comptabiliser qu’une seule cellule infectée sur 10.000 ou 100.000. Benjamin Dewals a démontré tout le contraire.

(1) Palmeira L., Sorel O., B.G.Dewals et al., An essential role for γ-herpesvirus latency-associated nuclear antigen homolog in an acute lymphoproliferative disease of cattle, PNAS, May 2013, Vol. 110, n°21

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