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Revisiter l’œuvre de Raymond Lemaire
07/05/2013

Force est certes de constater qu’il n’y est pas toujours parvenu… Et Claudine Houbart en explique les raisons par le menu, à travers quelques études de cas particulièrement éclairantes. Contrairement à ce qui avait prévalu dans la rénovation du Grand-Béguinage à Louvain, où Lemaire avait eu carte blanche, d’autres exemples montrent en effet qu’il a été « contrarié dans sa démarche ». Tel fut, par exemple, le cas pour la rénovation de la rue des Brasseurs, à Namur, dont il avait en charge l’étude préliminaire. Même constat très révélateur pour l’îlot Sainte-Anne,  qui jouxte la place du Grand Sablon à Bruxelles et sur lequel s’est notamment attardée Claudine Houbart.

« Jusqu’à la fin des années 1950, rappelle-t-elle, le centre de la capitale, déjà marqué par les grands travaux d’assainissement du XIXè siècle, a fait l’objet d’une frénésie modernisatrice qui a transformé les quartiers anciens en chantiers permanents, sans que la moindre voix significative ne s’élève contre les promoteurs et pouvoirs publics responsables du désastre patrimonial ». Le terme de « bruxellisation » est passé depuis dans le langage courant des professionnels de l’architecture. Wikipedia le définit même comme « un terme utilisé par les urbanistes pour désigner les bouleversements urbanistique d’une ville livrée aux promoteurs au détriment du cadre de vie de ses habitants, sous couvert d’une modernisation nécessaire ». C’est dire…

Dans la seconde moitié des années 1960, les mentalités vont peu à peu évoluer, fort heureusement. Le traumatisme causé par des destructions emblématiques comme celle de la Maison du peuple de Victor Horta, en 1965, entraînent une réaction forte, grâce notamment  à la création de deux associations de défense qui, bien que très différentes par leurs arguments et méthodes, poursuivent l’objectif commun de sauvegarder d’une autre manière la ville traditionnelle. Il s’agit de « Quartier des Arts » (dont Raymond Lemaire est le principal expert), en 1967, puis l’ « Atelier de recherche et d’action urbaines » (ARAU), en 1969.

Quartier des arts

Dès cette époque, Raymond Lemaire va contribuer à la remise en question des méthodes de rénovation urbaine adoptées par les Services techniques de la Ville de Bruxelles pour les quartiers les plus anciens du centre historique. A travers son rôle d’expert pour l’association « Quartier des Arts », il se voit confier plusieurs études en vue de l’adoption de « plans particuliers d’aménagement » (PPA) pour des îlots de grand intérêt patrimonial, comme l’îlot Sainte-Anne, qui sera, à partir de 1970, le premier projet de rénovation urbaine mené par Lemaire à Bruxelles.

Îlot Sainte-Anne : un échec !

« Cet exemple significatif permet de jeter un regard critique et nuancé sur le travail de Raymond Lemaire », note Claudine Houbart. « S’inscrivant dans un moment-clé de l’histoire récente de l’urbanisme bruxellois, la rénovation de cet îlot n’aboutira, après plus de quinze ans de tractations, qu’à une réalisation très partielle et fort éloignée des objectifs initiaux qui alliaient valorisation des bâtiments existants et réinterprétation contemporaine. Lemaire va en effet se trouver confronté aux intérêts divergents de nombreux acteurs publics et privés, en butte à des outils administratifs inadaptés et soumis au jugement sans concession de ses détracteurs. »

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