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L’œstradiol, une hormone sexuelle à deux vitesses
06/03/2013

Modèle-intégré

Quand l’œstradiol passe à la vitesse supérieure

À côté de ces effets à retardement que provoque l’œstradiol via son action génomique, cette hormone agit également de façon plus rapide en empruntant une voie non-génomique. « Ce mode d’action n’implique pas la modulation de l’expression de gènes », précise Charlotte Cornil. « Ici l’œstradiol se lie à des récepteurs membranaires situés à la surface des cellules et provoque un changement rapide du fonctionnement de ces cellules ». À titre d’exemple, ce type d’action de l’œstradiol au niveau des cellules nerveuses provoque une variation de la fréquence du potentiel d’action, c’est à dire de la décharge des neurones.

Charlotte Cornil et Aurore Seredynski, doctorante du laboratoire, en collaboration avec Gregory Ball de la Johns Hopkins University de Baltimore (Maryland, USA), ont voulu savoir si le mode d’action rapide de l’œstradiol (par la voie non-génomique) a un effet sur le comportement sexuel des cailles japonaises, modèle de prédilection du laboratoire.

« Le comportement sexuel peut être divisé en deux phases principales », reprend Charlotte Cornil. « La première appelée phase appétitive ou motivationnelle rassemble les comportements d’approche et de parade qui permettent aux partenaires de se rapprocher l’un de l’autre. La seconde, la phase consommatoire, se traduit par la séquence comportementale au cours de laquelle les partenaires copulent». Si la phase consommatoire est évidente à évaluer, la phase motivationnelle est mesurée par la fréquence de contraction de la glande cloacale chez le mâle de la caille. Les oiseaux étant dépourvus de parties génitales externes, les spermatozoïdes sont transférés du mâle vers la femelle lorsque les animaux mettent leurs cloaques (orifices postérieurs) en contact. La contraction de la glande cloacale en réaction à la vue d’une femelle est un des signes de motivation sexuelle chez le mâle. 

Un effet dichotomique sur le comportement sexuel

« Nous avons administré un traitement directement dans le 3ème ventricule du cerveau d’oiseaux mâles. Certains animaux ont reçu un inhibiteur de l’aromatase en combinaison ou non avec de l’œstradiol », explique Charlotte Cornil. Les résultats de cette étude publiée dans la revue Journal of Neuroscience (1) révèlent que le traitement était rapidement suivi d’un effet sur la phase motivationnelle du comportement sexuel des oiseaux mais n’avait aucun effet sur la phase consommatoire.

Les individus ayant reçu un inhibiteur de l’aromatase seul montraient une chute remarquable de la fréquence de contraction de la glande cloacale en réponse à la présentation d’une femelle tandis que ceux traités avec l’inhibiteur et l’œstradiol présentaient une fréquence de contraction de cette glande similaire à celle des contrôles. Mais dans l’un et l’autre cas, le traitement n’avait pas d’influence sur la copulation des individus. « C’était une vraie surprise, nous nous attendions à observer des effets sur les deux phases car elles sont extrêmement liées », indique la scientifique. Des tests supplémentaires ont confirmé ces résultats.

(1) Aurore L. Seredynski,  Jacques Balthazart, Virginie J. Christophe, Gregory F. Ball, Charlotte A. Cornil. Neuroestrogens Rapidly Regulate Sexual Motivation But Not Performance. The Journal of Neuroscience, January 2, 2013 • 33(1):164 –174.

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