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Le jeu des mémoires
18/02/2013

Apprentissage et consolidation

À l'Université de Liège, le groupe Aging and Memory, qui rassemble deux équipes, l'une travaillant sur le vieillissement normal, l'autre sur les démences, a mené récemment diverses expériences visant à mieux comprendre le fonctionnement des mémoires et les dysfonctions qui les affectent dans la maladie d'Alzheimer.

métabolisme-hippocampiqueEn clinique, l'apprentissage de liste de mots constitue un test classique d'évaluation de la mémoire épisodique. Dans le California Verbal Learning Test, une liste de mots est présentée oralement à 5 reprises aux participants. Après chaque présentation, il leur est demandé de répéter les mots dont ils se souviennent. « On peut ainsi analyser précisément la capacité d'apprentissage des sujets d'un essai à l'autre en calculant le pourcentage de nouveaux mots appris lors de chaque rappel », explique le professeur Salmon. Les neuroscientifiques de l'ULg ont proposé ce test à des sujets âgés normaux et à des patients Alzheimer (1). Avec quels résultats ? Tout d'abord, ils observèrent que la capacité d'apprentissage est dégradée non seulement chez les patients Alzheimer, mais aussi chez une fraction des personnes se plaignant de troubles cognitifs isolés sans grande répercussion sur la vie quotidienne (les « mild cognitive impairments »). Quelle fraction ? Celle qui regroupe les individus dont le futur sera marqué par une évolution vers la maladie d'Alzheimer.

Les chercheurs utilisèrent ensuite le PET scan (lire l’article Tomographie par émission de positons) au FDG (18-fluorodéoxyglucose) pour corréler ces résultats avec le fonctionnement cérébral des sujets durant l'état de repos, situation où l'individu est éveillé, les yeux fermés, et ne réalise aucune tâche. Il est apparu que chez les sujets âgés normaux, la capacité d'apprentissage est en relation avec l'activité métabolique d'une région pariétale antérieure impliquée dans l'attention. « Ce serait donc la capacité attentionnelle qui sous-tendrait les différences de performance entre les sujets sains », commente notre interlocuteur. Par contre, le décor change chez les patients Alzheimer. En effet, leur capacité d'apprentissage se révèle directement liée à l'activité relative de la région hippocampique, structure très impliquée dans la mémoire épisodique et particulièrement touchée dans la maladie d'Alzheimer.

Outre les capacités d'apprentissage des sujets, les neuroscientifiques se sont intéressés à la consolidation des acquis au fil des essais. Dans ce domaine aussi, les patients Alzheimer sont défaillants - leurs scores ne s'améliorent pas, ils oublient des mots dont ils s'étaient souvenus précédemment. Quelles sont les régions cérébrales impliquées dans la perte d'informations d'un essai à l'autre ? Pour l'heure, on l'ignore encore. « On ne peut imputer le phénomène à une région critique ; au contraire, il est vraisemblable qu'il relève de dysfonctions dans les relations qu'entretiennent plusieurs régions », indique Éric Salmon. Aussi l'équipe de l'ULg s'efforce-t-elle de développer de nouvelles techniques d'analyse ressortissant à la catégorie des analyses multivariées, afin de modéliser, après un examen en imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf), comment les interactions entre certaines régions cérébrales conditionnent la performance de consolidation mnésique (Lire Les voies de l'oubli).

(1) Genon S. et al., Verbal learning in Alzheimer's disease and mild cognitive impairment: fine-grained acquisition and short-delay consolidation performance and neural correlates, Neurobiol Aging (sous presse).

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