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À la rescousse des Iguanodons de Bernissart
27/02/2013

L’exhumation, la préservation et le montage des squelettes d’Iguanodons

Peu après leur découverte démarra un vaste programme visant à exhumer les ossements, très fragiles en raison de la pyrite qu’ils renferment, et à les protéger de l’inévitable dégradation liée à l’exposition à l’air ambiant et aux variations d’humidité relative. Les fossiles ont en effet été enfouis pendant des millions d’années dans leur gangue d’argile qui, créant des conditions anaérobies, ont permis leur remarquable préservation. Or, on sait maintenant qu’au contact de l’air ambiant la pyrite s’altère et se transforme en d’autres minéraux qui, par leur croissance et leur gonflement, provoquent l’éclatement des os. Les techniques de fouilles utilisées à l’époque sont toujours employées aujourd’hui. Les ossements furent dégagés après avoir été enrobés dans des blocs de plâtre et soigneusement numérotés afin de pouvoir par la suite reconstruire les squelettes en entier. Après dégagement des ossements par l’enlèvement du plâtre et des argiles les entourant, les os étaient enduits de colle forte pour empêcher leur désagrégement. La pyrite qui remplissait les creux des os était systématiquement enlevée et remplacée par du carton-pierre (mélange de craie, de colle de peaux d’animaux et de papier). Les squelettes furent ensuite montés en position supposée de vie et exposés au public. iguanodon-main

Des années d’exposition à l’air libre provoquèrent des dégâts très nets et une nouvelle méthode pour protéger les ossements fut développée dans les années 1930. Tous les spécimens furent démontés et on les plongea dans un mélange d’alcool et de gomme-laque (laque naturelle sécrétée par des cochenilles qui parasitent des essences tropicales en Inde et en Thaïlande). Deux cages vitrées furent construites autour des Iguanodons pour maintenir une température et un degré hygrométrique constants. En 2003, les squelettes furent tous démontés pour restauration. Les résidus de pyrite ont été soigneusement curetés, les ossements imprégnés de résine synthétique, les cassures recollées grâce à des colles fortes modernes et les fissures rebouchées par une pâte durcissante. Les squelettes ont enfin été placés dans de nouvelles cages de verre.

Comment ces couches argileuses plus récentes ont-elles trouvé place dans les terrains houillers plus anciens ?

Les « crans » sont des puits naturels résultant de la dissolution des roches solubles dans le calcaire carbonifère situé en profondeur. Cette dissolution a eu lieu durant le crétacé sous l’influence d’eau souterraine. Les vides créés dans la roche ont provoqué un effondrement se développant de bas en haut. Les terrains supérieurs, plus récents (schistes, terrains houillers), s’effondrent dans le puits sous forme de brèche. Les roches tendres de la couverture (sables et argiles) sont petit à petit soutirées dans le puits provoquant l’apparition d’un marécage en surface.

La formation de ce cran, à l’époque wealdienne même, est à l’origine du gisement des fossiles de Bernissart. Au début du crétacé, de nombreux Iguanodons vivaient sans doute dans le bassin de Mons mais un seul des 117 puits des terrains houillers du bassin a livré des Iguanodons. Le site était probablement à un des niveaux les plus profonds de la région et coïncidait avec la position du futur puits naturel. Les cadavres d’iguanodons glissaient vers cet endroit et s’y entassaient. Une fois le marécage formé, des dinosaures pouvaient également s’y enliser et ils disparaissaient ensuite lentement avec les argiles au fur et à mesure de leur enfoncement, échappant ainsi aux causes de destruction, comme l’érosion, qui ont fait ailleurs disparaître les restes de vertébrés enfouis dans les sédiments. Après la fin du fonctionnement du puits, d’autres terrains ont recouvert son emplacement sans y subir d’aspiration.

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