Le site de vulgarisation scientifique de l’Université de Liège. ULg, Université de Liège

Le bon Dieu n’avait pas tout prévu…
10/09/2012

Deuxième problème : l’animal a la fâcheuse manie de se nourrir de fruits mûrs. Ce n’est pas qu’il entraîne lui-même le dépérissement des fruits habituels des cultures (il intervient après un autre facteur l’ayant endommagé), mais il semble s’intéresser plus particulièrement aux raisins bien mûrs, s’y rassemblant en agrégats en fin de saison. Faute de pouvoir être aisément retiré du processus de fabrication, il se retrouve alors dans le vin, dont il altère le goût. Au vu de l’engouement pour la création de vignobles en Belgique, voilà qui pourrait donner du fil à retordre à nos (futurs) viticulteurs, à l’instar de leurs collègues français.

Enfin, troisième problème. A l’arrivée de l’automne, Harmonia axyridis est saisie d’un irrésistible réflexe de protection contre la chute des températures. Ne se contentant pas de trouver des abris naturels, elle affectionne également l’intérieur des habitations, en ville comme à la campagne, et plus particulièrement à proximité des surfaces boisées qu’elle a fréquentées pendant l’été. Inutile de colmater les anfractuosités : elle parvient à s’insinuer dans les minuscules interstices des châssis, murs et parois. Par dizaines ou par centaines (on a même observé des agrégats de plusieurs milliers d’individus !), les coccinelles asiatiques peuvent alors hiverner tranquillement dans les replis des tentures ou derrière une cloison, leur métabolisme tournant au ralenti durant toute la mauvaise saison.

Si la compagnie hivernale de quelques-uns de ces insectes peut paraître plaisante, il n’en va plus vraiment de même lorsque des centaines d’animaux envahissent les lieux de vie ou de sommeil, maculant les supports où ils sont regroupés d’un liquide jaunâtre nauséabond lorsqu’ils sont dérangés. Dans certains cas, les substances qu’ils dégagent peuvent entraîner des réactions de type allergique : asthme, rhinite, conjonctivite…  La présence d’allergènes a été démontrée dans l’hémolymphe. Des travaux américains assez récents ont abouti à la découverte d’allergies croisées entre la coccinelle asiatique et la blatte.

Formes-pronotums

Techniques de piégeage

Pour toutes ces raisons, il faut limiter leurs populations. Tout en se gardant de la moindre naïveté : leur présence est devenue inévitable et il est probablement impossible d’en venir totalement à bout. A l’Unité d’entomologie fonctionnelle et évolutive de Gembloux Agro-Bio Tech (Université de Liège), on travaille de longue date à une meilleure connaissance des mœurs d’Harmonia axyridis. L’un des  principaux objectifs des chercheurs consiste à mettre au point des techniques de piégeage respectueuses à la fois des écosystèmes fréquentés par les animaux (pas question de menacer d’autres espèces d’insectes, et encore moins les autres espèces de coccinelles) et de la sécurité des utilisateurs. Une étape importante vient d’être franchie avec les travaux de Delphine Durieux, chercheuse au service d’entomologie du professeur Eric Haubruge, réalisés en collaboration avec l'unité d'Analyse, qualité et risques (Laboratoire de chimie analytique). Ces recherches ont été consacrées aux rôles des chaînes hydrocarbonées dans la formation des agrégats de coccinelles au sein des habitations. « On sait, via d’autres recherches, qu’Harmonia axyridis est attirée à l’automne par des éléments proéminents dans le paysage, se détachant clairement sur l’horizon : montagnes, collines, bâtiments imposants, maisons isolées, etc, explique la jeune chercheuse. Encore faut-il découvrir ce qui se passe après le vol migratoire vers les édifices : comment et pourquoi les coccinelles asiatiques forment-elles ces agrégats ? Comment ceux-ci se maintiennent-ils tout au long de la mauvaise saison ? »

Page : précédente 1 2 3 suivante

 


© 2007 ULi�ge