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Agroécologie : vers une autre agriculture
04/09/2012

Au fil du temps, d’autres préceptes méthodologiques sont venus s’y greffer, comme le fait de devoir favoriser la gestion sur le long terme et plus seulement sur le court terme, ou encore la volonté de considérer la diversité comme un avantage plutôt que comme un inconvénient qu’il faudrait gommer à tout prix. Sans oublier certains principes socio-économiques, ajoutés par le groupe GIRAF : impliquer chercheurs, producteurs, consommateurs et pouvoirs publics, favoriser la possibilité d’autonomie par rapport aux marchés globaux et enfin valoriser la diversité des savoirs, tant locaux que traditionnels.

« La terre appartient à celles et ceux qui la travaillent »

Via Campesina (la « voie paysanne » en espagnol), qui fut l’un des premiers mouvements internationaux à s’inscrire dans la veine agroécologique, illustre bien le concept. Il puise ses racines dans les années 80, mais s’est officiellement constitué en 1993, lors d’une conférence à… Mons (Belgique), réunissant 46 représentants issus d’organisations paysannes, de travailleurs agricoles, de petits producteurs, de peuples indigènes… Ces organisations, venant d’Amérique du Sud, d’Amérique du Nord, d’Europe, etc. se regroupent autour de l’idée que, malgré les apparences, Nord et Sud partagent finalement une série d’intérêts communs, qu’ils doivent défendre ensemble. Via Campesina plaide aujourd’hui pour le respect des petits et moyens paysans et s’est fixé huit axes de travail : l’agriculture paysanne durable, la réforme agraire et l’accès à l’eau, la souveraineté alimentaire, la biodiversité, la défense des jeunes paysans, des femmes, des travailleurs migrants et des droits humains. Dans de multiples endroits du monde, le mouvement organise régulièrement des conférences, actions de sensibilisation, des campagnes de soutien… Son slogan : « Stop aux accaparement de terres. La terre appartient à celles et ceux qui la travaillent. »

Mais le futur de l’agroécologie passera également par toute une série d’initiatives actuellement « en voie de développement ». Comme l’agroforesterie, ce mode d’exploitation de terres agricoles combinant des plantations d’arbres dans des cultures ou des pâturages. Une pratique permettant d’allier production alimentaire, énergétique et biodiversité. Autre type de système dit « mixte » : la polyculture-élevage (soit le contraire de la monoculture), qui vise à combiner cultures et élevages sur un même site pour tirer de leur complémentarité des avantages. La question des semences entre aussi dans ce débat. Aujourd’hui, la mise au point, la production et la diffusion des variétés de semences sont aux mains de firmes privées. Les fermiers n’ont plus le droit de sélectionner et de diffuser leurs propres semences. Tout passe désormais par l’industrie semencière qui imposent ses critères d’homogénéité et de standardisation.  Cette approche a provoqué la disparition de multiples variétés. L’idée est dès lors d’en revenir à un mode de production plus adapté aux nouveaux défis en matière de résilience (changement climatique) de biodiversité (goût, etc) et d’autonomie locale. On pourrait enfin citer la certification participative, cette tentative de réintégrer les consommateurs et les producteurs dans le processus de certification de l’alimentation biologique dont ils sont jusqu’à présent exclus.

« L’avenir passera aussi par la formation, conclut Pierre Stassart. On constate qu’il existe une forte demande de la part des étudiants, une volonté de s’investir dans un modèle capable de renouveler l’agronomie en répondant aux enjeux sociaux agroecologieet aux défis planétaires : énergie, biodiversité, changement climatique notamment. Il faudra aussi participer à faire évoluer les idées dans les arènes internationales et se poser cette question centrale : comment organiser face à l’impasse actuelle des systèmes non durables,  la transition pour qu’un autre modèle tel que l’agroécologie devienne réalisable ? Souvent, changer, implique d’apprendre à apprendre autrement… ce qui peut impliquer en quelque sorte  de renoncer en la transformant à la manière d’apprendre qui nous a menés à l’impasse actuelle. »

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