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Akhénaton revisité
17/05/2010

Le livre de Dimitri Laboury lève une partie des incertitudes qui occultaient, jusqu’il y a peu, la succession du pharaon monothéiste. Il explique comment sa fille aînée, Meritaton, s’empara du trône vers l’âge de 13 ans, en écartant momentanément l’héritier mâle Toutankhaton, ce petit garçon qui allait devenir Toutankhamon. Ces années-là enchevêtrent un tissu de machiavélisme, de duplicité et de mensonges en comparaison desquels certaines intrigues de la Renaissance italienne auraient l’innocence d’un plat de nouilles au beurre. Il est en tout cas certain que c’est Meritaton, régnant sous le nom de Néfernéférouaton, qui va initier la restauration d’une théocratie basant la légitimité pharaonique sur un système religieux polythéiste, comme avant le règne de son père. Exit Aton, retour à l’ancien régime ! Pourquoi ce revirement si rapide ? On peut imaginer que la souveraine adolescente a dû subir une pression maximale de l’entourage royal, hérissé depuis longtemps par l’«hérésie » atoniste. Et qu’elle a dû s’incliner devant les membres et auxiliaires de la cour, rouages indispensables pour asseoir son pouvoir encore mal assuré.

petit temple aton

C’est cependant son jeune frère Toutankhaton, grimpant sur le trône d’Égypte un peu plus tard, sous le nom de Toutankhamon («l’image vivante d’Amon»), qui s’appropriera pleinement la décision du retour à l’ancien régime. Le jeune pharaon et son entourage justifient l’abandon de l’atonisme par l’état de déliquescence dans lequel il aurait plongé le pays : si l’Egypte a subi des revers à l’extérieur, si elle a été lourdement frappée par les épidémies, c’est parce que les dieux s’en sont détournés pour punir le roi de les avoir abandonnés. Cette restauration du «pays comme lors de sa première fois» ira de pair avec l’abandon d’Akhet-Aton comme résidence royale. Amarna est alors délaissée, ses édifices en grande partie démantelés pour réutiliser leurs matériaux à de nouvelles constructions, et le site rendu à sa solitude balayée par les vents. Plus jamais il ne sera fait officiellement mention du règne d’Akhénaton, délibérément rayé de la mémoire collective.

Humain, comme il pouvait l’être

Voué aux gémonies par ses successeurs, parce que son hérésie sacrilège aurait valu à l’Egypte les pires calamités, Akhénaton continue à fasciner les Occidentaux depuis sa «redécouverte», à la fin du XIXème siècle. Et ceci en raison des multiples spéculations, théories et fantasmes plus ou moins romanesques qui gravitent, depuis lors, autour de sa personne. Mais l’Akhénaton qui ressort du livre de Laboury surprendra sans doute beaucoup de lecteurs, car il est incompatible avec le visionnaire mystique ou l’humaniste généreux que certains s’attendraient peut être à rencontrer, tel qu’il avait été «recréé» par l’imaginaire occidental. Le pharaon que l’on découvre ici est pourtant bien le personnage que suggèrent les faits attestés de son règne, dans l’état actuel de la science égyptologique. C’est, avant tout, un monarque absolu, qui chercha à détourner la religion égyptienne à son profit exclusif, pour renforcer son pouvoir théocratique sans partage. Loin des qualités et des défauts qu’on lui a prêtés, Akhénaton redevient, ainsi, simplement humain. Comme pouvait l’être un potentat de l’Antiquité…   

 

Consulter le dossier : Akhénaton : la théocratie solaire sur le site Culture

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